Faire exister l’inconscient

Le vocabulaire de la psychanalyse a envahi la société et l’usage des signifiants propres à la psychanalyse est passé dans le langage commun. Aujourd’hui, les réseaux sociaux livrent photos et vidéos en toute transparence, mettant l’éphémère et l’instantané aux commandes. Où rencontrer le sujet dans ce tourbillon ? C’est l’expérience analytique qui y pourvoit.

Nous avons tous fait l’expérience d’un réveil brutal à la suite d’un rêve dérangeant qui suscite perplexité ou même angoisse. Ce rêve est le produit de l’inconscient et comme l’écrit Lacan dans le Séminaire V : « L’inconscient, […], ne s’éclaire et ne se livre que quand on regarde un peu à côté.[1] » L’inconscient parvient cependant à dire, mais cela ouvre sur une certaine opacité, une équivoque, c’est une écriture à déchiffrer.

Christiane Alberti écrit que : « L’inconscient s’attrape […] à la surface, au ras du discours, dans ses dérapages, dans tous les menus ratés de la vie quotidienne, là où le sujet se trahit lui-même[2] ».

Le rêve, pris dans le transfert, n’est pas à interpréter par l’analyste comme tel, mais il peut, selon les cas, permettre de « souligner un point, de mettre en tension des éléments du rêve avec des associations de l’analysant, de mettre l’accent sur un oubli, de rapprocher une partie du rêve avec des moments signifiants de la vie de l’analysant. Il ne s’agit pas de rajouter du sens, mais par le maniement de la scansion, de l’équivoque, d’ouvrir le sujet à un questionnement vers un désir de savoir[3] ».

Quand Lacan dit que « la meilleure image pour résumer l’inconscient, c’est Baltimore au petit matin[4] », il illustre ce qui précède, à savoir que l’inconscient « c’est une pensée avec des mots […] qui échappent à votre vigilance, à votre état d’attention[5] ».


[1] Lacan J., Le Séminaire, livre V, Les formations de l’inconscient », texte établi par J.-A. Miller, Paris, Seuil, 1998, p. 22.
[2] Alberti C., « La langue concrète que parle l’inconscient », Ornicar ?, no 53, 2019, p. 145.
[3] Briole G., « Le rêve : une interprétation du sujet », La Cause freudienne, no 34, octobre 1996, p. 52.
[4] D’après Lacan J., « De la structure comme immixtion d’une altérité préalable à un sujet quelconque », La Cause du désir, no 94, novembre 2016, p. 10.
[5] Ibid.

https://journees.causefreudienne.org/faire-exister-linconscient-2/