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Interprétation vs Refoulement

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« Le nouveau en psychanalyse est toujours de l’ordre de l’interprétation ; c’est qu’il gagne sur le refoulement [1] ». 

Lacan, après Freud, distingue deux refoulements. Il y a : « le vrai, le bon, le refoulement de tous les jours [2] », qui est secondaire. Il est précédé par le refoulement originaire, Urverdrängt, tel que le désigne Freud. L’Urverdrängt, Lacan le place dans la catégorie de l’impossible, celle qui « ne cesse pas de ne pas s’écrire [3] », ce par quoi il désigne également le réel. C’est ce premier refoulement que traite le refoulement de tous les jours, celui qui permet « que l’être, en parlant, jouisse, et, j’ajoute, ne veuille rien en savoir de plus[4] ».  

Lacan, dans le Séminaire « R.S.I. », invite à nous intéresser à ce refoulement originaire : « si nous ouvrons les yeux à l’ex-sistence de l’Urverdrängt, soit ce refoulement que l’analyse affirme non seulement comme premier, mais comme irréductible. C’est ce qu’il s’agirait de suivre à la trace [5] ». Dans la cure, c’est l’usage de l’interprétation qui s’attèle à suivre cette trace. L’interprétation vient faire entendre à celui qui parle, ce qu’il dit, révélant à l’occasion un savoir nouveau le concernant. Pour autant, Lacan démontre que ce savoir n’a pas pour visée de produire une accumulation de connaissances ou un progrès. C’est « un savoir du soi tout seul [6] », précise Jacques-Alain Miller, qui ne vaut que dans le contexte où il a été énoncé, une trouvaille, « toujours prête à se dérober à nouveau [7] ». Le signifiant échoue à pouvoir dire le réel et c’est ce que l’évanescence de la trouvaille dévoile.   

La surprise que produit à l’occasion l’interprétation résulte donc certes de cette production d’un savoir inattendu, mais aussi de cette rencontre d’une « faille du savoir attendu [8] », d’un trou dans le savoir. C’est à viser cette faille que l’interprétation gagne sur le refoulement et pousse le sujet à entretenir une relation avec le réel, ou du moins, à ce qu’il « essaye de se tenir au niveau du réel [9] ».  


[1]  Miller J.-A., « L’oubli de l’interprétation », La lettre mensuelle, no 144, décembre 1995, p. 2.  
[2]  Lacan J., Le Séminaire, livre XX, Encore, texte établi par J.-A. Miller, Paris, Seuil, 1975, p. 57.  
[3]  Lacan J., « L’ombilic du rêve est un trou », La Cause du désir, no 102, juin 2019, p. 37. 
[4]  Lacan J., Le Séminaire, livre XX, Encore, op. cit., p. 95.  
[5]  Lacan J., Le Séminaire, livre XXII, « R.S.I. », leçon du 8 avril 1975, Ornicar ?, no 5, hiver 1975-1976, p. 42. 
[6]  Miller J.-A., « L’inconscient réel », Quarto, no 88-89, décembre 2006, p 8.  
[7]  Lacan J., Le Séminaire, livre XI, Les Quatre Concepts fondamentaux de la psychanalyse, texte établi par J.-A. Miller, Paris, Seuil, 1973, p. 27.  
[8]  Koretzky C., Le Réveil. Une élucidation psychanalytique, Rennes, PUR, 2012, p. 104.  
[9]  Miller J.-A., « Le réel est sans loi », La Cause freudienne, no 49, novembre 2001, p. 17.  

 

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