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Point de capiton et épissure

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Le thème des J53 et, en particulier, le signifiant « épissure », prélevé dans l’une des thématiques de l’appel à contribution, a évoqué et a soulevé d’une part, la question de la différence de logique entre le point de capiton et l’épissure, et d’autre part, la question de savoir si l’un comme l’autre relevaient de l’interprétation. Si le point de capiton se réfère au premier enseignement de Lacan, la notion d’épissure prend son assise dans le dernier enseignement.

Le point de capiton
C’est dans son Séminaire sur Les psychoses[1] que Lacan mentionne cette formule. À partir de sa lecture du cas de Schreber, il avance plusieurs éléments qui permettent d’en cerner la définition et la fonction.

Tel que je le saisis, le point de capiton est un signifiant qui fonctionne comme « le point où viennent se nouer le signifié et le signifiant, entre la masse toujours flottante des significations[2] » nous dit Lacan. Il ajoute « autour de ce signifiant, tout s’irradie et tout s’organise, à la façon de ces petites lignes de force formées à la surface d’une trame par le point de capiton. C’est le point de convergence qui permet de situer rétroactivement et prospectivement tout ce qui se passe dans ce discours[3] ».

Autrement dit, le point de capiton a pour effet de fixer le sens. Il vient capitonner la fuite du sens. Ce signifiant émerge du discours de l’analysant mais peut être extrait et souligné par l’analyste qui lui donne alors valeur de ponctuation dans le dire de l’analysant. Si ce signifiant opère comme point de capiton, il est susceptible de permettre un changement de position subjective. À l’occasion, il me semble que le point de capiton peut être une nomination.

L’épissure
Dans le Séminaire sur Le Sinthome[4], c’est, cette fois-ci, à partir de sa lecture de Joyce que Lacan nous permet de saisir qu’ici, ce ne sont plus le signifié et le signifiant qu’il s’agit de nouer ensemble mais le réel, le symbolique et l’imaginaire, à partir de la clinique des nœuds. Le nouage des trois registres est ce qui permet d’enserrer un trou. Ce nouage est permis par le Nom-du-père ou ce qui lui fait suppléance lorsque celui-ci est forclos. C’est ici notamment un autre nom qui peut permettre cette fonction d’agrafe, à savoir le sinthome. Lacan nous dit que dans l’analyse, « c’est de sutures et d’épissures[5] » dont il s’agit. L’épissure est ce qui va permettre de faire tenir ensemble des éléments, par exemple ce qui donne du sens, c’est une épissure entre l’imaginaire et le symbolique. Lacan ajoute que « quand nous faisons cette épissure, nous en faisons du même coup une autre, précisément entre ce qui est symbolique et le réel. C’est-à-dire que, par quelque côté, nous apprenons à l’analysant à épisser, à faire épissure entre son sinthome et le réel parasite de la jouissance[6] ».

Point de capiton et épissure : des modalités de l’interprétation ?
Il me semble donc que ce qui peut faire fonction de point de capiton, comme ce qui peut faire fonction d’épissure, peut relever d’une nomination. Mais dans le premier cas, cette nomination donne une signification nouvelle, tandis que dans le second, elle noue différents registres et localise la jouissance. C’est plutôt ici le signifiant hors-signification qui est convoqué.

Point de capiton et épissure relèvent, à mon sens, de l’interprétation dans la mesure où chacune de ces modalités apparaît comme un supplément de signifiant que l’analyste aura prélevé et souligné, ponctuant ainsi le dit analysant, pour avoir une chance de viser l’effet d’un dire qui peut faire évènement. C’est en tous cas ce que je propose.


[1] Lacan J., Le Séminaire, livre III, Les Psychoses, texte établi par J.-A. Miller, Paris, Seuil, 1981.
[2] Ibid., p. 303.
[3] Ibid., p. 303-304.
[4] Lacan J., Le Séminaire, livre XXIII, Le Sinthome, texte établi par J.-A. Miller, Paris, Seuil, 2005.
[5] Ibid., p. 73.
[6] Ibid.

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