Une sentence

« L’existence, ici, ce n’est pas autre chose que le fait que le sujet, à partir du moment où il se pose dans le signifiant, ne peut plus se détruire, qu’il entre dans cet enchaînement intolérable qui se déroule immédiatement pour lui dans l’imaginaire, et qui fait qu’il ne peut plus se concevoir que comme rejaillissant toujours dans l’existence. »

Lacan J., Le Séminaire, livre VI, Le désir et son interprétation, texte établi par J.-A. Miller, Paris, La Martinière/Le Champ freudien, 2013, p. 114.

« C’est comme si je me prononçais une sentence », formule ce patient anglophone. Cette phrase est essentielle, car elle introduit de l’inédit dans ce que dit ce sujet. En effet, pour lui le mot n’est pas une sentence de la Chose et son discours ne connaît pas de point d’arrêt, la séance non plus. La mort l’attire, la frôler le soulage, mais le bourreau le condamne à vivre.
La phrase Je me prononce une sentence peut s’entendre alors comme un vœu de briser cette douleur d’exister induite par l’interminable déroulement de la chaîne signifiante.
Or cette brisure est déjà écrite dans l’homophonie de la langue du sujet car le mot sentence en anglais signifie aussi phrase, celle dont il cherche à s’extraire. La séance a pu, avec cette homophonie, trouver son point d’arrêt. Elle a permis de créer une rupture vivable entre les signifiants, car c’est bien au niveau du langage, de la chaîne signifiante, du symbolique, qu’il est question de savoir disparaître, et non pas réellement.