« Qu’une de vos oreilles s’assourdisse, autant que l’autre doit être aigüe. Et c’est celle que vous devez tendre à l’écoute des sons ou phonèmes, des mots, des locutions, des sentences, sans y omettre pauses, scansions, coupes, périodes et parallélismes, car c’est là que se prépare le mot à mot de la version, faute de quoi l’intuition analytique est sans support et sans objet. »
Lacan J., « Situation de la psychanalyse », Écrits, Paris, Seuil, 1966, p. 471.
Quelques lignes plus haut, Lacan vient de corréler « rituel technique » et « dégradation des objectifs ». L’intuition analytique est spéciale, ni « l’intuition commune », ni « l’intuition prétendue projective », ni encore « l’intuition qui domine toute la spéculation de Hegel », précise-t-il. « L’intuition de Freud », quant à elle, en est la déclinaison princeps, originelle. Si « intuition analytique » est un hapax dans les Écrits, il n’est pas sûr que L’intuition analytique, avec un grand L, existe.
Il y a certes la singularité de chaque analyste, de son parcours d’analysant, et de son être objet qu’il a pu cerner dans sa cure. C’est plutôt au style de l’analysant dans son « faire[1]» que Lacan invite ici à prêter une oreille, à son énonciation, à sa lalangue témoignant des traces laissées par l’eau du langage et que seul le procédé de l’association libre permet de situer.
[1] Lacan J., Le Séminaire, livre XV, L’Acte analytique, texte établi par J.-A. Miller, Paris, Seuil/Le Champ freudien, 2024, p. 66.